LA THEOSOPHIE

 

La théosophie, elle, concerne d’abord la connaissance des mystères cachés de la divinité et, par extension, celle de l’univers dans ses rapports avec Dieu et avec les hommes. C’est pourquoi on peut parler d’ésotérisme au sens large lorsque celui-ci s’enrichit de la dimension théosophique.

 

Le mot théosophia , signifie étymologiquement « sagesse de Dieu »,

Les théosophoï  sont, littéralement, « ceux qui connaissent les choses divines ».

 

Le sens du mot se précise nettement au début du XVIIe siècle, peut-être sous l’influence de l’Arbatel , livre de magie blanche paru vers 1550 ou 1560, et fort répandu, où ce terme a déjà son sens actuel. On le trouve dès lors chez des auteurs aussi importants que Heinrich Khunrath (De Igne ), Oswald Croll (Basilica chymica ) et surtout Jacob Boehme. À la fin du chapitre VIII du De signatura rerum  (P 56), répondant à ceux qui lui reprochent de confondre la Nature avec Dieu, donc d’être « païen », J.Boehme précise qu’il ne parle pas de la nature régie par le spiritus mundi , mais d’une autre nature, qui est Verbe (ou Mercure) intérieur ; et il écrit à ce propos : « Ich schreibe nicht Heidnisch, sondern Theosophisch » (« Je n’écris pas comme un païen, mais comme un théosophe »). La théosophie de J.Boehme comporte une philosophie de la Nature, mais il conçoit cette nature comme essentiellement céleste et divine ; de nombreux théosophes ultérieurs, même inspirés par lui, intégreront à cette philosophie la nature entière, sous toutes ses formes, même les plus concrètes. " le Livre de la Nature nous aide à mieux comprendre l’Écriture et Dieu lui-même".

Parmi  ses principaux Disciples nous pouvons nommer : Martinez de Pasqually et Louis Claude de Saint Martin chers aux Martinismes

 

Le moment où la théosophie acquiert ses lettres de noblesse coïncide en Allemagne avec l’apogée de la littérature baroque, ainsi qu’avec la naissance du mouvement dit Rose-Croix, c’est-à-dire aux alentours des années 1610-1620.

 

Les deux plus importantes œuvres théosophiques du début du siècle sont allemandes, elles aussi ; leur retentissement sera grand, et leurs titres sont explicites : Theophilosophia theoretica et practica  (1710), de Sincerus Renatus, et Opus mago-cabalisticum et theosophicum  (1721), de Georg von Welling.

 

 

Quand Mme Blavatsky fondera la Société théosophique à partir de 1875, une certaine confusion apparaîtra, , car celle-ci se présente d’une manière différente. C’est souvent à cette société que l’on pense aujourd’hui quand le mot « théosophie » est prononcé , ce qui est un peu dommage car les grands Théosophes sont antécédents à l'œuvre de la " Hiérarchie "  qui avait pour but (dans cette création) de faire disparaître les castes et d'établir un pied d' égalité afin de permettre l' évolution de ce grand pays qu'est l' Inde.

 

Par « théosophie », de même que par « ésotérisme », on entend donc d’abord une herméneutique (ta’wil , en Iran), c’est-à-dire une interprétation de l’enseignement divin – par exemple, du Livre révélé – fondée à la fois sur une démarche intellectuelle, spéculative (le mode de pensée est ici analogique et homologique, l’homme et l’univers étant considérés comme les symboles de Dieu), et sur une révélation due à une illumination. Dans le cas de la théosophie, cette interprétation porte sur les mystères intérieurs à la divinité elle-même – c’est la théosophie au sens restreint – ou sur ceux-ci et l’univers entier – c’est la théosophie au sens large, celui dont il s’agit ici.

 

Il s’agit, cette fois, de descendre non plus seulement en soi, mais aussi dans la profondeur de Dieu et des choses naturelles, ces deux mouvements se complétant d’ailleurs.

Dans ses profondeurs, la Déité « repose en elle-même », enseigne Jacob Boehme, c’est-à-dire qu’elle demeure dans son absolue transcendance ; mais, en même temps, elle sort d’elle-même, car « Dieu est un trésor caché qui aspire à être connu ». Il se fait connaître en se dédoublant au sein d’une sphère ontologique située entre notre monde créé et l’inconnaissable, sphère qui sera le lieu de rencontre entre Dieu et la créature (mais, bien entendu, nous ne connaissons Dieu que pour autant qu’il se révèle à nous selon nos structures anthropologiques et culturelles). En même temps, les mondes viennent à l’Être, prennent forme, pour être le lieu de la manifestation divine. Saint Paul semble avoir justifié par avance cette recherche active et opératoire, en écrivant que « l’Esprit scrute tout, jusqu’aux profondeurs divines »).

 

chez le théosophe, comme chez le gnostique en général, toute augmentation de savoir s’accompagne d’un changement de l’être, processus heureusement inévitable dès lors qu’il joue  les drames théogoniques et cosmiques, qu’il mime  les esprits et les éléments. Le discours qu’il profère, le récitatif qu’il module ne semblent pas être son œuvre propre, mais plutôt celle d’un ange dont il serait seulement l’organe ; aussi est-ce dans le choix de ses images et dans la forme de son discours qu’on peut découvrir chaque fois son originalité propre..

 

Le théosophe consacre son énergie à « inventer », mais au sens originel de « retrouver », l’articulation de toutes les choses visibles et invisibles, en scrutant à la fois le divin et la Nature, observée souvent dans ses plus infimes détails.

 

le panneau central  théosophique « complet » (théogonie et cosmogonie, cosmosophie, eschatologie), a cette fois,  des symboles qui relient les prototypes d’en haut à leurs manifestations d’en bas.

La vision d’Ézéchiel, "par exemple", exprime un symbolisme qui implique une révélation cosmologique universelle. La Kabbale juive dite de la Merkaba , ou voie mystique du Chariot, se fonde entièrement sur cette vision d’Ézéchiel ; ainsi l’auteur du Zohar  « voit » dans les créatures vivantes et dans les roues décrites par le prophète un ensemble d’images symboliques interprétable comme une clef de connaissance cosmique. Il est évident, par ailleurs, que les deux modes d’approche théosophique (symbolisme mythologique et symbolisme typologique) s'entendent bien la plupart du temps chez un seul et même théosophe.

 

Les Chercheurs préfèrent voir, notamment chez Jacob Boehme, « une véritable psychologie des profondeurs » – et cela, sans se prononcer sur la réalité objective de ce à quoi les révélations boehméennes nous renvoient, c’est-à-dire sans réduire celles-ci à une dimension unique qui serait d’ordre purement psychologique.

 

La théosophie, en effet, ne prétend pas qu’il faille dépasser l’homme pour le transformer en autre chose qu’un homme ; elle lui rappelle seulement quels étaient ses vrais pouvoirs et tente de les lui rendre. Elle enseigne que rien ne sert finalement de vouloir escalader le ciel en méprisant la terre, ou de se satisfaire de la descente des dieux sans chercher à visiter avec eux l’Olympe .

 

L’histoire de l’alchimie spirituelle est évidemment un chapitre de l’histoire de la théosophie, en raison de l’idée alchimique de régénération de l’humanité et de la nature auxquelles il s’agit de rendre leur dignité, perdue depuis la chute (cf. Paul, Rom., VIII, 19-22). On peut citer, parmi les théosophes les plus intéressants d’Occident : les kabbalistes juifs (le Zohar  fut écrit au XIIIe s., et la kabbale est évidemment une théosophie), Paracelse, Corneille Agrippa, Robert Fludd, Jacob Böhme, J. V. Andreae (XVIIe s.), Martines de Pasqually, Louis-Claude de Saint-Martin, Rudolf Steiner, et bien d'autres oublié dans ma mémoire …..

 

La Société théosophique

 

Le colonel Henry Steel Olcott (1832-1907) rencontra Helena Petrovna Blavatski (1831-1891), dite H. P. B., vers 1874. Très impressionné par cette femme, qui avait exercé au Caire diverses activités, Olcott fonda avec elle, en 1875, aux États-Unis, la Société théosophique destinée à étudier l’occultisme et l’ésotérisme, selon des approches fort diverses, particulièrement orientales.

Tous deux décident très vite de répandre aux Indes l’activité de leur Société théosophique, d’autant qu’ils paraissent avoir disposé d’un certain nombre d’appuis moraux et financiers ; ils arrivent dans ce pays en 1879, y recueillent un certain succès dans les milieux anglais, font l’acquisition en 1882, à Adyar, près de Madras, d’une belle demeure, qui reste aujourd’hui encore le centre mondial de la Société.

 

En 1887, H. P. B. quitte les Indes pour Londres, mais Olcott continue à enseigner, aux Indes, un syncrétisme fait de bouddhisme, de théosophisme, ainsi que d’éléments empruntés à d’autres traditions religieuses.

 

Un peu plus tard, en 1889, l’Anglaise Annie Besant (1847-1933), femme de pasteur, qui avait été gagnée au socialisme matérialiste, se convertit au théosophisme en lisant La Doctrine secrète  de H. P. B. Elle fait la connaissance de l’auteur et devient rapidement un des chefs de la Société théosophique. Puis elle part pour les Indes en 1893, y répand l’enseignement de H. P. B. et d’Olcott, en développant, parallèlement, l’instruction publique dans ce pays.

 

Annie Besant connaît là-bas un succès personnel certain, mais seulement dans les milieux anglais ou anglophiles, aidée dans son œuvre par C. W. Leadbeater, dont la pensée fantaisiste s’exprime de manière assez spéciale en ce qui concerne l’éducation des jeunes gens.

 

C’est à l' instigation d' Annie Besant qu’est créée en France, en 1893, une franc-maçonnerie féminine d’inspiration théosophique, le Droit humain, favorisée par l’influence de la princesse de Mariategui, devenue duchesse de Pomar puis lady Caithness (1832-1895), spirite impénitente et amie de H. P. B.

 

Les rapports de la Société théosophique avec le scoutisme sont certains (A. Besant fut la « protectrice des scouts du monde entier »).

 

Une loge unie des Théosophes est fondée en 1909, entreprise sérieuse, vouée à l’étude ainsi qu’à la propagation d’une théosophie authentique. Cela n’empêche pas l’Autrichien Rudolf Steiner (1861-1925), membre de la Société théosophique, mais qui reproche à celle-ci son antichristianisme, de se détacher de la Société théosophique en 1913.

À Paris, l’édifice Adyar, square Rapp, est aujourd’hui à la fois un lieu accueillant où des conférenciers d’obédiences intellectuelles fort diverses peuvent venir s’exprimer et un siège où diverses branches de la Société théosophique se montrent actives.

 

Isis dévoilée  (1877), de H. P. B., suggère le programme « doctrinal » de la Société théosophique, en une profusion de symboles et d’images.

La Doctrine secrète , (1888), son ouvrage le plus fabuleux et sans doute le plus lu, se présente comme une compilation d’éléments syncrétiques auxquels elle a su donner une dimension vraiment originale.

Elle déclare exposer la Tradition primordiale.